Un pauvre paysan chinois travaillait dur. Il était aidé dans les travaux des champs par son fils. Un jour, rassemblant toutes ses économies, il partit au marché acheter une bête pour soulager leur labeur. Il ramena un superbe cheval blanc pour tirer la charrette, rentrer les récoltes, rapporter le bois et faire bien d’autres tâches encore. Ce qui satisfaisait les deux hommes.
Leur voisin voyant cela se montra jaloux et proposa au pauvre paysan d’acheter le cheval.
Le paysan répondit : « Ce cheval est beaucoup plus qu’un animal pour moi, c’est un ami, je ne veux pas le vendre. »
Un jour, le cheval sauta au-dessus de la clôture et disparut.
Le voisin passant devant l’écurie vide dit au fermier : « C’était prévisible qu’on volerait cette bête ! Pourquoi ne me l’avez-vous pas vendue ? Vous n’avez pas de chance ! ».
Le paysan se montra plus circonspect : « N’exagérons rien dit-il. Le cheval ne se trouve plus dans l’écurie, c’est un fait ! Tout le reste n’est qu’une question d’appréciation de votre part. Comment savoir si c’est une chance ou une malchance ? Nous ne connaissons qu’un fragment de l’histoire. Qui sait ce qu’il adviendra? ».
Le voisin se moquait du vieil homme. Il le considérait depuis longtemps comme un simple d’esprit.
Le fermier n’étant pas assez riche pour s’acheter un autre cheval, il continua de travailler dur avec son fils. Quinze jours plus tard, le cheval revint. Il n’avait pas été volé ; il s’était tout simplement mis au vert et ramenait une douzaine de chevaux sauvages de son escapade.
Le voisin du fermier vint lui rendre visite : « Vous aviez raison, ce n’était pas un vol. Vous avez de la chance! » .
« Je n’irais pas jusque-là » dit le paysan. « Je me contenterais de dire que mon cheval est revenu. Comment savoir si c’est une chance ou une malchance ? »
Le paysan demanda à son fils de dresser les étalons sauvages, ce qu’il entreprit. Au cours d’une séance de dressage, un des chevaux jeta son cavalier à terre et le piétina, lui cassant une jambe.
Le voisin vint une fois de plus donner son avis : « Pauvre ami, vous n’avez pas de chance, voici que votre fils unique est estropié. Qui donc vous aidera pour les travaux de la ferme ? Vous êtes vraiment à plaindre. »
« Voyons, » rétorqua le paysan, « n’allez pas si vite. Mon fils a perdu l’usage de sa jambe, c’est tout. Qui peut dire ce que cela nous apportera? Nul ne peut prédire l’avenir ».
Quelque temps plus tard, la guerre éclata. Tous les jeunes hommes du village furent enrôlés dans l’armée, sauf le fils du pauvre paysan qui était invalide.
« Vieil homme, » se lamenta le voisin, vous aviez raison ; « votre fils ne peut plus marcher, mais il reste auprès de vous, tandis que nos fils vont se faire tuer à la guerre. »
« Je vous en prie » répondit le paysan, « ne jugez pas hâtivement. Vos jeunes sont enrôlés dans l’armée, le mien reste à la maison, c’est tout ce que nous puissions dire. Est-ce un bien ou un mal? Qui peut le dire ? »
«Les choses ne changent pas. Change ta façon de les voir, cela suffit.»
« Un jour, un disciple demande à son maître :
« Comment faire face à la souffrance ? »
Le maître lui demande alors d’aller chercher du sel. Quand le disciple revient avec le sel,
le maître lui demande de mélanger une grande cuillère de sel dans un verre d’eau et de boire le verre d’eau.
« Quel goût cela a-t-il ? » demande-t-il.
« C’est salé. » répond le disciple, en faisant une grimace.
Le maître rit de bon cœur et demande au disciple de verser la même quantité de sel dans le lac voisin.
« Maintenant, bois de l’eau du lac. » lui dit-il.
Le disciple obtempère et boit une gorgée de l’eau pure du lac.
Le maître l’interroge à nouveau :
« Quel goût cela a-t-il ? »
« L’eau est fraîche et elle a le goût de la neige. » répond le disciple en faisant un grand sourire.
« As-tu senti le goût du sel ? » demande le maître.
« Non. » répond le disciple.
Le maître lui explique sur un ton empli d’une grande compassion :
« La souffrance que l’on éprouve est représentée par le sel. La quantité de souffrance reste exactement la même.
Cela dit, son degré d’intensité dépend du « contenant » dans lequel tu places ta souffrance.
Aussi, lorsque tu souffres, la seule chose que tu puisses faire est d’élargir ton cœur.
Ton cœur est soit semblable à un verre d’eau soit semblable à un lac ! »
Publié dans « Être »par Padma Hridaya